Operation 8

2006 - 2012
Sommaire

Extrait du document judiciaire utilisé pour justifier les perquisitions, montrant comment les mots « die for Tūhoe » (« mourir pour Tūhoe »), extraits hors contexte d'une conversation privée, ont été utilisés pour suggérer qu'une personne était « prête à mourir pour la cause Tūhoe » (informations personnelles censurées par le No Trace Project). Tūhoe est une iwi (tribu) maorie dont les membres ont été particulièrement visés par l'opération.

Le 15 octobre 2007, environ 60 perquisitions visant des militant·e·s autochtones maoris, des anarchistes et d'autres militant·e·s ont eu lieu à travers la Nouvelle-Zélande dans le cadre d'une opération intitulée « Operation 8 ».[1] Quelques autres perquisitions ont eu lieu en 2007 et 2008. Une vingtaine de personnes ont été arrêtées et initialement accusées d'appartenir à un groupe terroriste et d'organiser des « camps d'entraînement quasi militaires » dans des zones rurales reculées. En 2007 les accusations initiales ont été abandonnées et la plupart des inculpé·e·s ont à la place été poursuivi·e·s pour possession d'armes et de cocktails Molotov et, pour certain·e·s d'entre elleux, pour appartenance à un groupe criminel. En 2011 les poursuites contre la plupart des inculpé·e·s ont été abandonnées et seules quatre personnes sont restées inculpées.[2]

L'opération a débuté en 2006 lorsque la police a appris l'existence des « camps d'entraînement ».[3]

Lors d'un procès en 2012 :

Techniques utilisées

NomDescription
Barrages routiers

Le matin des perquisitions du 15 octobre, la police a mis en place un barrage routier sur la seule route menant à une zone où plusieurs perquisitions avaient lieu.[1] Pendant la majeure partie de la journée, les policiers chargés du barrage routier ont fouillé, interrogé et photographié les personnes qui passaient sur la route.[6]

Cartographie de réseau

Avant les perquisitions, les enquêteurs ont passé plusieurs mois à établir des liens entre des personnes en étudiant les métadonnées :[3]

  • D'appels téléphoniques.
  • De SMS.
  • D'emails.
Collaboration des fournisseurs de service
Autres

Les enquêteurs ont utilisé la collaboration de fournisseurs de service pour obtenir des informations sur des personnes depuis de nombreuses sources, y compris :[3]

  • Des dossiers judiciares.
  • Les actes de naissance, de décès et de mariage.
  • Les registres électoraux.
  • Les dossiers de Work and Income New Zealand (WINZ),[7] l'agence publique prestataire de services sociaux.
  • Les registres fonciers.
  • Les registres de propriété automobile.
  • Les registres d'immatriculation de véhicules.
  • Les listes de clients des fournisseurs d'électricité.
  • Des relevés bancaires.
  • Les registres des déplacements à l'étranger, remontant dans un cas jusqu'en 1983.
  • Trade Me, le principal site web d'enchères en ligne de Nouvelle-Zélande.

Les enquêteurs ont utilisé la collaboration de l'armée néo-zélandaise pour déterminer qui, parmi une liste de 58 personnes, avait servi dans l'armée, vraisemblablement afin d'identifier celles qui avaient une expérience militaire pouvant être mise à profit dans les « camps d'entraînement ».

Opérateurs de téléphonie mobile

Les enquêteurs ont utilisé la collaboration des opérateurs de téléphonie mobile pour intercepter des appels et des SMS.[3] Les SMS interceptés ont révélé les dates et les lieux des « camps d'entraînement » ainsi que les noms des participant·e·s.

Dispositifs de surveillance cachés
Audio

Des microphones ont été installés dans plusieurs véhicules et domiciles.[3]

Vidéo

Des caméras ont été installées à plusieurs reprises près des « camps d'entraînement ».[3] Elles étaient installées peu avant le début des camps et retirées peu après. L'objectif était d'identifier les participant·e·s aux camps, leurs activités et leurs tenues vestimentaires. Les images filmées par ces caméras ont montré des personnes :

  • S'entraînant au maniement des armes à feu.
  • Apprenant des tactiques militaires : patrouilles, exercices de contre-embuscade, etc.
  • Expérimentant avec des cocktails Molotov.

Au moins une caméra a été installée à l'extérieur du domicile d'une personne.

Indics

Au moins deux indics ont été actifs dans le cadre de l'opération.[8] Notamment :

  • Des indics ont fourni aux enquêteurs des informations générales sur les inculpé·e·s et les dates des « camps d'entraînement ».
  • Un indic a proposé à quelqu'un de lui vendre un fusil de chasse, vraisemblablement afin que cette personne puisse ensuite être poursuivie pour possession illégale d'arme à feu.
Interprétation biaisée des preuves

L'affaire a été caractérisée par une absence de preuves que les inculpé·e·s planifiaient une attaque spécifique, et s'est à la place construite autour de l'interprétation de preuves circonstancielles.[3] Par exemple :

  • Des activités filmées par des caméras cachées près des « camps d'entraînement » (entraînement au maniement des armes à feu, apprentissage de tactiques militaires, expérimentation avec des cocktails Molotov) ont été interprétées comme une préparation à une prise de contrôle violente d'une partie du territoire néo-zélandais.
  • Dans des conversations privées enregistrées par des microphones installés dans des véhicules, certain·e·s inculpé·e·s ont tenu des propos fanfarons ou peu sérieux, notamment à propos de « partir en guerre », d'acquérir un fusil de précision à longue portée, d'assassiner George W. Bush ou de tuer des Pākehā (Néo-Zélandais d'origine européenne). Ces propos ont été interprétés comme révélateurs d'intentions violentes.[9]
Open-source intelligence

Les enquêteurs ont obtenu des informations sur des personnes à partir de recherches sur Internet et d'articles de journaux.[3]

Perquisition

Dans les perquisitions, les enquêteurs ont saisi :[1]

  • Des appareils électroniques.
  • Des photos.
  • Des vêtements et du matériel de camping, notamment des tentes, des chaussures de randonnée et des bâches. Ces articles ont été saisis afin d'être comparés à des articles similaires visibles dans des vidéos des « camps d'entraînement ».
  • Des véhicules.
  • Neuf armes à feu.

Certaines des perquisitions ont été particulièrement minutieuses : les flics ont fouillé des congélateurs, des poubelles et des bacs à compost.

Science forensique
Reconnaissance de démarche

Une personne a été identifiée sur les vidéos des « camps d'entraînement » sur la base de sa taille, de sa démarche et de sa couleur de peau.[9]

Surveillance physique
Aérienne

Le matin des perquisitions du 15 octobre un hélicoptère de la police survolait une zone où plusieurs perquisitions avaient lieu, apparemment pour surveiller les lieux.[1]

Cachée

Les enquêteurs ont régulièrement suivi des personnes à pied et en véhicule.[3]

Les enquêteurs ont régulièrement mené des opérations de surveillance cachée près des « camps d'entraînement », mais n'ont pas pu s'approcher suffisamment pour voir ce qui s'y passait et n'ont pu qu'entendre des coups de feu.[9]